Little Women
09 décembre 2020
Critique par Émilie Morin

Little Women fait partie de ces ouvrages qu’il m’a fait mal de refermer. Récit initiatique racontant le passage à l’âge adulte de Meg, Jo, Amy et Beth March, Little Women m’a fait vivre plusieurs deuils, et pas seulement littéraires. Alcott a réveillé en moi non pas des souvenirs d’enfance, mais des émotions que j’avais jusqu’ici oubliées. Jo March m’a fait revivre mon difficile au revoir au monde de l’enfance, que j’ai quitté à reculons, tout comme elle. Je me suis revue, plus jeune, dire que je ne me marierais jamais, me moquer de mes camarades qui apportaient plus d’intérêt aux garçons qu’aux romans, trouver ridicule l’idée de l’adolescence et de l’âge adulte. C’est aussi la première fois que j’ai saisi l’importance du premier amour, et le désenchantement causé par sa perte. Alcott m’a réconciliée avec cet amour raisonnable qui suit le premier, cet amour où l’on choisit la personne qui nous accompagne, plutôt que de se laisser porter par la passion; elle m’a montré la légitimité de ces sentiments que mon esprit idéaliste avait de la difficulté à accepter.
Little Women m’a fait mal, m’a fait pleurer, m’a imprégnée de nostalgie, ce sentiment à la fois doux et amer. Face aux obstacles qui se mettent à travers le chemin des quatre soeurs March, le récit n’a d’autre réponse que «c’est la vie», une réponse qui nous confronte en tant que lecteur, habitué.e.s que nous sommes aux histoires extraordinaires auxquelles participent les personnages de tels romans. Le livre se pose aussi, je crois, comme une fable qui nous montre la différence entre «réussir dans la vie» et «réussir sa vie»; à la fin, les graines du bonheur semées par les soeurs March ont eu le résultat escompté, et elles sont bel et bien heureuses. Mais Little Women nous montre que la vie qui nous satisfait le plus n’est pas nécessairement celle que nous avions planifiée au départ.
Un magnifique roman que je prendrai plaisir à relire, et que je qualifie sans hésiter de livre favori.
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