Le maître des illusions
25 octobre 2021
Critique par Émilie Morin
Je me suis souvent fait recommander ce roman, le premier de l’autrice américaine Donna Tartt. Je l’ai croisé à plusieurs reprises sur les listes des meilleurs romans policiers; l’ai vu encore et encore sur les tables des librairies; l’ai acheté et regardé s’empoussiérer pendant plusieurs mois sur les étagères de ma bibliothèque. J’attendais le bon moment pour le lire et maintenant que je l’ai lu, je m’en veux de ne pas l’avoir fait avant.
À mon humble avis, Le maître des illusions fait partie de ces livres qu’il faut avoir lus dans sa vie. Difficile de croire que Donna Tartt signe là son premier roman – elle a en écrit d’autres depuis –, tant la plume est maîtrisée. Situé à la fin des années 80, sur le campus d’un collège du Vermont, le récit a le charme d’une époque où la technologie était encore à l’arrière-plan, et où il était probablement plus facile de commettre le crime parfait. Dès les premières pages, on nous annonce qu’un crime sera commis : la victime est identifiée, son (ou ses) meurtrier(s) aussi. Pourtant, Tartt réussit à nous tenir en haleine. Certes, le récit est prenant, mais c’est vraiment le style qui rend ce roman exceptionnel.
L’écriture de Tartt est détaillée, mais efficace. Elle transmet des émotions, mais surtout des mentalités. On se surprend à sympathiser avec des personnages qui ne sont pas nécessairement sympathiques, et à en aimer qui ne méritent pas de l’être. Tandis que Tartt explore le relativisme d’une moralité déformée par l’illusion, on finit en fait par se demander si, en tant que lecteur, on ne serait pas tombé dans le piège, nous aussi. La fiction serait-elle en mesure de déformer notre regard sur la moralité, le temps d’une lecture? Le maître des illusions fait partie de ces nombreux exemples qui nous font dire oui. Le thème de la moralité y est exploité d’une façon qui n’est pas sans rappeler le Crime et châtiment de Dostoïevski : culpabilité, errance, détérioration du corps et de l’esprit sont tant d’éléments qui animent les centaines de pages qui font suite au crime.
Ainsi, près de 30 ans après sa parution, Le maître des illusions charme encore. Ce roman se savoure lentement, mais vous aurez probablement l’envie irrépressible de lire encore un chapitre ou deux avant de vous mettre au lit…
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