Buzzkill

29 juin 2021

Critique par Julien Renaud

Buzzkill, c’est un Bye bye en format littéraire, une lecture à ne pas prendre au premier degré et un roman dystopique au chic fini rose doré parfait pour les selfies.

Dans un monde préapocalyptique, trois amis milléniaux aspirent au glam, à la popularité ou à la viralité, chacun dans son domaine, peu importe le prix. Océane est psychologue et rêve du succès de ses livres sur la quête du bonheur; Marcus est un beau gosse comédien prêt à jouer la comédie de la politique pour devenir le visage d’un peuple perdu et profiter de sa soif de symboles; Gaspard travaille dans le domaine des jeux vidéo et aime bien reproduire chaque petit déchet qui traîne dans la rue avec grand réalisme dans la réalité virtuelle, question que la frontière entre le réel et le virtuel disparaisse presque.

«Gaspard découvre un monde fantastique et en déteste chaque seconde. […] On ne peut pas y croire. Immersion zéro. Aucune merde de chien. Pas de sang séché, de porno, de graffitis, d’enveloppes de condoms. Même pas d’ordures sur le trottoir.»

Quand le trio touchera enfin au succès, la rébellion des réalistes, ces êtres qui prêchent par l’hyperréalité, qui parlent de liberté collective et qui craignent une extinction massive, mais surtout qui n’arrivent pas à s’élever parmi les privilégiés, réussira à bousculer l’ordre établi.

«Admettons que les baby-boomers ont détruit le monde, OK? […] Il faut sauver le monde. Notre génération doit renverser le capitalisme. […] Depuis la révolution industrielle, on est les premiers qui peuvent pas espérer que leurs conditions de vie s’améliorent. Si ça se trouve, on va mourir plus jeunes et vivre avec moins… moins de sécurité, moins de propriété, moins de toute.»

Quand tout explose, l’évasion est parfois la seule solution… le temps que la révolution s’épuise.

Entre le fake, le real et le weird, devant «toute cette shit», j’ai ressenti un malin plaisir à alterner entre l’amour et le dégoût des personnages, à sourire à leurs actions absurdes, à être fasciné par leur égoïsme. La réalité virtuelle prend une place importante dans ce roman, et c’est sans doute pour nous faire comprendre que nous sommes plutôt dans une réalité augmentée, dans une réalité caricaturée. Tout est poussé à l’extrême; on berce dans l’invraisemblable et dans le ridicule contemporain. Mais on ne se sent jamais dans un monde étranger…

Comme lecteur, il faut accepter de jouer son rôle dans cette comédie noire, se détacher, enfiler ses lunettes de réalité satirique et se laisser porter dans un univers que l’on souhaite éviter. Il faut y aller all-in. Buzzkill, c’est un livre absurde qu’on aime ou qu’on déteste, comme un Bye bye.

Moi, je me suis laissé prendre au jeu et j’ai adoré cette escapade loufoque.

Si ça ne t’interpelle pas, swipe à gauche!

Laissez un commentaire sur cette critique

Autres critiques littéraires
Territoire de trappe

Sébastien Gagnon et Michel Lemieux

Obsolète

Alexandra Gilbert

À la maison

Myriam Vinvent