Bâtons à message / Tshissinuashitakana

12 mai 2021

Critique par Julien Renaud

J’ai écouté la poésie de Joséphine Bacon via l’application OHdio d’Ici Radio-Canada. L’ouvrage bilingue, en français et en innu-aimum, est lu par la poétesse innue de Betsiamites (Pessamit) et sa «petite soeur», Chloé Sainte-Marie. Ce choix s’est avéré judicieux, car il est plus facile d’apprécier la poésie des mots que l’on ne comprend pas à l’oral qu’à l’écrit. Ces mots, que j’aurais survolés à la lecture, je les ai célébrés en les entendant, en écoutant leur musique, leur souffle.

J’ai accepté avec bonheur l’invitation à rêver des traditions des Premières Nations. La nature, le territoire, l’entraide, la solidarité et le partage jaillissent d’un court texte qui résonne tout en profondeur, sur une trame sonore qui rappelle le son du tambour, écho d’une culture à protéger.

J’ai fermé les yeux et j’ai laissé les deux oratrices me guider sur un chemin parsemé de bâtons à message, plantés à même cette terre si précieuse, pour rappeler la voie. «Nous sommes rares / Nous sommes riches / Comme la terre / Nous rêvons.»

Mais «où sont passés les Innus»?

La poétesse se demande si elle a «perdu la trace de leur passage»; mais si son territoire et sa culture sont parfois effacés, elle les fait revivre avec ses mots, elle leur redonne leurs couleurs, leur essence. «Quand une parole est offerte / Elle ne meure jamais / Ceux qui viendront l’entendront.»

Une identité effritée vit ainsi par les souvenirs, en honorant ses origines, en rendant hommage à la tradition. «Moi, fils de louve / Moi, fils de guerrier / Ma nation crie sa révolte / Et parcourt dans ses rêves / Ces espaces qui autrefois / L’accueillaient comme un fils / Glorieux ayant su / Protéger les siens / La terre de ses ancêtres / Dans l’horizon sans dimension. […] Moi, fils de louve / Moi, fils de guerrier / Parmi toutes les guerres / Je reste fils d’une terre / Qu’on m’arrache, me soudoie / On m’écrase, on me tue / Mais toujours, je resterai / Guerrier de cette terre / Qui a vu naître nos mères / Nos pères et nos enfants.»

Laissez un commentaire sur cette critique

Autres critiques littéraires
Territoire de trappe

Sébastien Gagnon et Michel Lemieux

Obsolète

Alexandra Gilbert

À la maison

Myriam Vinvent