Les querelleurs
07 novembre 2020
Critique par Julien Renaud
J’écris ce début de critique après avoir fini de rédiger ce qui s’en vient, car j’ai été surpris de la tournure de l’exercice. Ce n’est pas une lecture que j’ai particulièrement appréciée; pourtant, au moment de l’analyser, je lui trouve plusieurs points positifs. Il n’en demeure pas moins que si certains éléments étaient appréciables, j’ai terminé ce roman avec une déception équivalente à celle d’avoir mal choisi son repas sur le menu, sans pour autant qu’il soit mauvais.
Les querelleurs est essentiellement, presque entièrement, l’histoire d’un combat judiciaire entre un éditeur et un auteur. Après avoir convenu de publier une nouvelle édition d’un roman qualifié de chef-d’oeuvre, ils se déchirent lorsque l’écrit encaisse un échec majeur. Il y avait certes un contrat, mais la liberté artistique devrait-elle trôner à un point tel qu’un auteur puisse stopper la publication d’une oeuvre achevée?
Parfois, on a pitié pour l’éditeur, devant cet auteur qui regrette une oeuvre sur le tard, submergé de critiques négatives, et qui tente d’invalider un contrat signé en bonne et due forme. À quel moment a-t-il décidé de ne plus assumer son oeuvre? Avant d’y mettre le point final, en la relisant une dernière fois ou maintenant qu’elle n’est pas acclamée comme il l’espérait?
Puis, on s’offusque devant cet éditeur qui pense davantage à l’argent qu’à l’héritage d’une oeuvre, qu’à la marque d’un romancier ayant écrit l’histoire par le passé. L’auteur n’est pas satisfait de son oeuvre? Contrat, pas contrat, il devrait pouvoir se retirer pour protéger son intégrité artistique, non? On ne peut pas enfermer un génie dans un cadre aussi rigide, contractuel.
Ensuite, on penche de nouveau du côté de l’éditeur, car l’auteur n’a jamais exprimé clairement ses appréhensions. Combien de temps devait-il attendre? Comment entendre ce qui n’est jamais dit?
Bon, on est de retour dans le camp de l’auteur, dont la vie s’est écroulée après cet échec. Quelle vie ingrate que celle de l’artiste, qui peut atteindre des sommets et toucher le fond d’une oeuvre à l’autre!
Jamais, je n’ai pris pleinement le bord du plaignant ou du défendeur. Les deux ont leurs torts et leurs vérités. Surtout, l’un et l’autre sont suffisants et détestables. En alternant entre ces deux narrateurs, on décide que ni l’un ni l’autre ne nous méritent. On se demande aussi s’il est possible qu’un conflit n’ait pas une victime et un coupable, mais bien deux victimes et deux coupables. À parts égales? Et le juge est contraint de trancher…
Il y a aussi les avocats stéréotypés. L’un est à cheval sur chaque virgule de sa bible criminelle; l’autre aime parler fort, faire des métaphores et jouer le théâtre de la justice.
En fait, ce livre est un regard sur un système judiciaire souvent décevant et obligé de trancher – la leçon la plus pertinente de ce texte, à mon avis. Un regard sur une relation affaires-arts toujours aussi compliquée. Un regard sur l’estime de soi, dosée dans ses deux extrêmes. Tout cela en fait tout de même un récit pertinent. Semble-t-il qu’il y ait aussi un message féministe, à en croire la quatrième de couverture, mais je ne l’ai pas perçu. Sinon que la femme est absente du roman.
Comme lecteur, je cherche à être touché et ce ne fut pas le cas. J’ai fini ce livre (très court) en étant heureux de le refermer, mais cette oeuvre n’est pas inutile. Elle lance un message, pose un constat.
Pour les lecteur.rice.s de plaisance, l’avertissement est lancé. Si vous aimez lire des essais ou détester des personnages, par contre, c’est peut-être une grande oeuvre.
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