La saveur du printemps

14 mars 2021

Critique par Julien Renaud

Mon initiation à la bande dessinée adulte s’est faite tout en douceur et en tendresse, avec La saveur du printemps, une oeuvre «pétrie avec amour» par Kevin Panetta (scénario) et Savanna Ganucheau (dessins), comme l’indique le signet intégré à la deuxième de couverture.

La saveur du printemps, c’est l’histoire d’une tendre romance entre Ari et Hector, d’abord amis, puis amoureux, en haute définition, portée par de séduisantes illustrations.

Ari tente de fuir la pâtisserie familiale, se sentant étouffé par un destin tracé d’avance, probablement au bénéfice de la musique. Il veut partir avec les amis de son groupe vers une autre ville. Mais d’abord, il doit trouver quelqu’un pour prendre sa place à la pâtisserie et assurer l’avenir du commerce familial. Après une série d’entrevues d’embauche infructueuses, Ari rencontre Hector, un jeune passionné de pâtisserie qui est de passage pour on ne sait trop combien de temps, à la suite du décès de sa mamie.

Dans la cuisine de cette petite pâtisserie locale, une relation tout en délicatesse se développe entre les deux jeunes hommes, si bien qu’Ari retrouve en partie le goût de la pâtisserie et veut de moins en moins quitter cette vie, maintenant qu’Hector en fait partie. Ensemble, ils cuisineront, regarderont les étoiles et partageront un bouquet de moments de tendresse.

Le premier baiser arrivera enfin, à la page 282, puis une catastrophe surviendra, venant déstabiliser ce qui cherchait à s’établir…
�Là où l’oeuvre est particulièrement intéressante, c’est qu’il est question d’amour sans égard aux genres. L’homosexualité d’Hector est certes une variable connue dans ce récit, mais Ari ne questionne ou ne verbalise en aucun moment son orientation sexuelle, quelle qu’elle soit. Il tombe amoureux, tout simplement.

Le moment le plus touchant survient lorsque le père d’Ari dit: «Mais… n’essaie pas d’être ce que tu penses devoir être. Sois ce que tu aimes.»

Sans nommer les choses, cet attachant personnage résume alors l’essence de l’acceptation de la diversité sexuelle: à chacun son amour, tant qu’amour il y a.

La quête identitaire à l’adolescence et les relations familiales sont aussi abordées de façon parfaitement authentique.

Concernant la forme, j’ai adoré les illustrations uniquement composées de nuances bleu-vert. Ce choix traduit la sincérité et la sérénité, et ajoute à la douceur de l’oeuvre, que j’ai consommée tranquillement, pour étirer le plaisir. Comme lecteur, je me suis instinctivement logé dans un état de délicatesse et d’ouverture, et je suis convaincu que ce sont les dessins qui m’ont entraîné dans leur douceur, dans leur tendresse.

Je salue également les petites attentions à la fin de l’oeuvre: la recette des fameux petits pains au levain de la boulangerie, des essais graphiques et une liste de chansons choisies par Hector pour Ari, pour faire durer le plaisir et côtoyer un peu plus ces attachants personnages.

J’ai sourcillé à quelques endroits pour des expressions, la traduction s’adressant peut-être davantage à un public français que québécois, mais jamais de façon à réduire mon intérêt.

Terminons avec la question qui figure sur la quatrième de couverture: «Y a-t-il une recette pour découvrir qui l’on est et ce qu’on veut dans la vie?» Ma réponse, à la lumière de cette lecture coup de coeur: «Non, il suffit de suivre notre coeur…»

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